vendredi 28 février 2020

Fantômes du passé, enfant battus, délaissés la suite !

On tait ses blessures en général, (pas seulement reliées à des trauma sexuels ou pédocriminalité) parce qu'on redoute, comme l'expérience nous l'a appris, que dévoiler sa fêlure (et quelle fêlure parfois) n'encourage des prédateurs ''à l'affut'' (qui n'osent attaquer ceux qu'ils haïssent  et ou envient ? redoutant de ne pas être de force) à se ruer alors sur nous pour nous écorcher.. UN ANIMAL SAUVAGE, C'EST CE QUE NOUS SOMMES TOUS en cas de trauma, lorsqu'on y a survécu. RENVOYÉS À L'ARCHAÏSME ANIMAL, l'animal qui se cache lorsqu'il est blessé afin de ne pas tenter un prédateur qu'il sent à l'affût partout ; on se tait, on fait bonne figure. Un enfant qui très jeune a subi l'injustice, coups, peur, engueulades terrifiantes (sans objet ou prétextes) humiliations, insultes, utilisation, délaissement (y compris dangereux) .. de la part de celle ou celui qui st sensés l'en protéger n'a plus confiance en PERSONNE. Puisque personne autour de lui, des témoins mêmes, ne le soutient, c'est que personne ne le fera. (C'est peut être que ça se passe comme ça normalement et qu'il faut se taire, comme tous.) Comment lui demander de parler ? J'ai eu la chance que mes instit, Marguerite et Josée aient réussi la performance de me soutenir clairement SANS dénigrer Lydie, un tour de force dont ces deux 'vieilles' femmes très peu instruites qui m'ont eue en charge furent capables. Sans cela j'eusse été perdue.

Exemple: quand j'ai parlé..
[au départ ici DEUX paroles se superposent, une concernant une AGRESSION SEXUELLE traumatique* subie par moi à 16 ans ; l'autre, qui n'a rien à voir, mon soutien à Anita, 13 ans (non apparentée) victime gravissime d'abord de son grand père, et ensuite de la DDASS où elle fut abandonnée (dans des foyers ou familles d'accueil, -viols-)..  Anita que j'ai CRUE et soutenue autant que possible ] ...
 ... bref, qd j'ai PARLÉ donc dévoilé ma fêlure, j'ai AUSSITÔT été le cerf à courre d'Adèle, tante de la petite et syndrome de Stockholm, défendant bec et ongles son père incriminé et accablant la petite (ainsi que la mère disparue de celle-ci) inversant cause et conséquence du drame et de son comportement (addict) ...  Adèle qui : 1 me calomnia partout, (folle mytho** son leit motiv, je l'ai su par des potes) sans bcp de succès (je suis connue et.. elle aussi) et 2 : vola une lettre que j'avais écrite à son mari (mon cousin, dans laquelle je faisais mon 'coming out' au sujet de l'agression sexuelle subie à 16 ans) puis sans rien lui en dire Y ''RÉPONDIT'' à SA PLACE par une lettre d'insultes particulièrement cruelle, et hors sujet (je serais une s. qui fais des histoires partout*** sème la merde, que personne ne peut aimer, d'ailleurs mon mari m'avait quittée trompée c'est pour ça, et mes enfants aussi, que je n'avais pas élevés ms laissés à ma mère, je ne parviendrais pas à comprendre un Couple, une Famille heureuse où On s'Aime sans autre choses (majuscules 'respectées' ms orthographe corrigée) où tout est Limpide et Rien De caché etc ...'' (passage désopilant si on songe qu'elle répondait à une lettre VOLÉE destinée à son mari au nom de celui-ci qui en ignorait tout... pour revendiquer la LIMPIDITÉ de leurs relations !) Il s'agissait d'un transfert presque parfait, comme l'observa mon fils qui avait trouvé le 'poulet' plein d'épluchures prêt à partir à la poubelle et l'avait lu malgré moi, en éclatant de rire**...Par la suite elle briefa sa fille contre moi, sa fille qui avec elle envahit ma propriété, menaçante, qui m'accusa devinez? d'inceste avec mon cousin (son père) j'ai dû faire intervenir les gendarmes pour qu'ils partent et depuis je ne peux plus aller chez ''moi''.

* il y en eût une autre, à 3 ans, non traumatique car je fus IMMÉDIATEMENT débrifée par ma gd mère.
** accusation classique contre ceux qui parlent ou dont on le redoute, Anita en fit les frais aussi..
*** intéressant de voir que l'homme que j'incriminais dans ma lettre, mon agresseur, n'était nullement un ami d'Adele qui le défendait pourtant en m'accablant odieusemement, bien au contraire, un bourgeois cultivé limite méprisant envers la gentuzza inculte vulgaire qu'elle représentait pour lui ... alors qu'au contraire, autrefois, j'avais été plutôt une 'amie voire même une aide. Un syndrome de Stockholm agit à rebours et de la logique, de l'éthique et de son PROPRE INTÉRÊT. Il se solidarise avec le victimeur quelqu'il soit et s'en prend à la victime, quelle qu'elle soit, c'est la structure squelettique qui lui permet de tenir. Dites lui que vous avez des attirances ACTÉES pour des gamines, tendance sadiques ou autre perversion et vous aurez ses suffrages, (même s'il n'est pas lui même pédo car parfois il le devient, et seulement victime, directe ou indirecte) ; dites lui que vous êtes victime, ou solidaire d'une victime-enfant (moi, je cumulais les deux) et il va vous déchirer à plaisir ! ou s'il est prudent, lancer contre vous un séide bien préparé (ce qui est une manière assez moche de le ou la victimiser par ricochet car il est évident que vous refuserez ensuite tout contact dont ce ''demi innocent.e'' eût grandement bénéficié.)

Note, si après avoir été victime ou seulement témoin impuissant (ce qui est parait-il pareil quant au trauma) les hommes tendent à devenir agresseurs, mais pas les femmes, bcp plus nombreuses à être agressées, on peut ici se demander si le syndrome de Stockholm ne 'remplace' pas chez les femmes cette tendance des hommes à réitérer leurs dols sur une victime, car finalement cela revient au même, ils infligent une souffrance à une victime, mais à la place d'un autre, du victimeur. En ce sens le complexe de Stockholm serait identique à celui du larbin : il se soumet (ça le rassure) à plus fort et lui rend service pour blesser ses victimes. Indirectement. On voit ici Adèle, non pas agresseure directe comme peut être un homme l'eût été, mais accableuse active cruelle* de TOUTE victime, surtout si celle-ci ose parler (Anita bien sûr, et moi-même qui cumule : 1 je la soutiens donc participe plus ou moins à sa dénonciation de son gd père et 2 je fais mon propre coming out quant à un trauma, infiniment moindre) et défenseure inconditionnelle de tout agresseur, même s'il la mésestime et si la victime de celui ci au contraire a incontestablement fait montre de générosité. D'où l'affreux dicton, "aide vilain tu seras son chien, botte le, son souverain".

* avec une cruauté insigne, Adèle, dans sa lettre, mélange le vrai et le faux et attaque comme un lynx un cerf plus puissant au défaut de l'épaule où elle s'accroche pour déchirer lentement : ma mère vient de mourir, je viens d'être à la retraite, ma fille après une anorexie gravissime pendant laquelle j'ai dû la confier à Lydie tout en m'en occupant de loin (études, lycée) je ne la vois plus, (ms elle réussit sa carrière) mon fils, si, mais avec qques pb moins graves, je n'ai aucune fratrie, mon mari en effet s'est associé à une autre femme (ce qui à l'époque me peinait) et enfin, ça, Adele l'a oublié ou ne l'a pas su ! une amie chère, ne m'ayant (la preuve est faite de ce qui m'était dit et répété et que je balayais) ne m'ayant courtisée que lorsque j'étais au top et pour CELÀ (exploitation) m'a larguée violemment etc ... Cela arrive svt en chaine, c'est l'entonnoir. Je suis donc en plein marasme (alleluïa, elle peut y aller enfin!) ms cette partie de l'affaire se règlera au mieux conformément à l'éthique, grâce à des amis, (D'AUTRES) ..  (quoique je ne puisse encore venir chez moi), mais la 'vraie' victime hélas demeure Anita, plus fragile, qui se suicidera à l'alcool. Il faut une immense base d'appui pour résister aux Syndromes de Stockholm, de la chance, être sans (trop) de scrupules, plus retorse, plus intelligente qu'eux. Cette force, je l'ai eue. Anita à 13 ans, et m après, forcément ne l'avait pas ...
Fantômes du passé
 

samedi 13 octobre 2018

La recherche du temps gagné, du coté d'Odette

 '' La recherche du temps gagné'' côté femmes .. Titre ''Le Prince 'petit pois' '' où ''Papier cul sur bonheur du jour''...   avec seulement Solange, jusqu'à présent, marrante et talentueuse, mais sans dte bien d'autres ensuite ! Un patchwork intéressant.
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'' Pour lui, le drame était qu'elle n'était pas ''suffisante'', il lui fallait un cadre, une chambre propre, des draps en lin immaculés (sinon rien), la Roque, le somptueux rocher en vue du lit. Il ne bandait pas forcément plus mais rêvait davantage. Elle s'angoissait de seulement faire partie d'un cadre, fût-elle l'essentiel du décor (et encore !) ... car ce n'était toujours que du décor. Elle sentait par exemple que si elle pétait, il ne l'aimerait plus. Aussi s'entraînait-elle à péter un maximum afin de mesurer son amour pour elle, déterminer le moment où il allait flancher. Car il n'y a pas de milieu entre désir et dégoût. L'attente frémissante et l'horreur à vomir. Pauvres putes.. elle songea que pour cela seul, elle n'aurait sans doute pas pu embrasser une carrière apparemment lucrative et aux horaires largement aménageables. Nulle question de morale ici.

Aussi s'entraînait-elle à péter un maximum. Bien que, en aparté, cela lui coûta en terme d'alimentation. Haricots, cassoulets, soupe à l'oignon : ses exigences mettaient le cuisinier--davantage habitué à la préparation de mets raffinés et allégé pour Monsieur souffrant d'embonpoint- dans tous ses états. Mais elle n'en avait cure, et poussait la malice jusqu'à réclamer un supplément d'ail cru dans chacun des plats qui lui étaient préparés. De toutes ces menues astuces, lui n'avait pas conscience. Ennuyé, dédaigneux, il ne s'abaissait à la considérer que lorsque les exigences de la chair le taraudaient si tant est que, au niveau de sa personne, on puisse parler d'exigence de la chair. Tout bon observateur eût tôt fait de parler, à son propos, soit d'exigence de l'orgueil... soit de débordement au sujet de la chair par elle même. Mais en aucun cas, de cette pulsion virile, fière et dure, qu'on associe communément à la chair et à ses exigences... Le fait est : monsieur restait gras, en dépit des efforts patients et imperturbables de son cuisinier. Et elle, malgré un régime scrupuleusement suivi jour après jour et nettement moins diététique, restait fine, racée, princière. On eu dit une aristocrate accoquinee à un savatier un peu ivrogne

Le fait est que, des deux, c'était lui l'aristocrate. Mais il n'y paraissait point.

C'était une ordalie en somme, ces combats du Moyen âge où on jugeait du bien fondé d'une cause à la survivance ou la préservation du vainqueur, et de la turpitude du vaincu au fait qu'il l'était, justement ! une ordalie, comme le fut l'anorexie de sa fille, flirtant avec la mort plusieurs mois. Il ne cédait pas. Il l'aimait donc toujours.

Mais qd m ! il était parti rejoindre celle qu'il n'aimait pas, Carine. En un sens cela lui convenait tout à fait, la charge étant pour elle parfois un peu trop lourde à porter seule. ''Pas suffisante'', pensez. Restait la solitude, adorée et haie à la fois. Travailler, peindre et composer enfin, sans sa présence, son oeil critique, imprévisible et versatile. Mais aussi parfois bienveillant. Aimant. Cela variait sans cesse. Il y avait le Raoul debout et le Raoul couché, ce n'était pas le même. Le Raoul couché était prêt à tout. Le Raoul debout vitupérait pour une cuillère déplacée comme une vieille fille chatouillée. Carine, elle, (celle qu'il n'aimait pas) rangeait très bien On ne peut tout avoir, le beurre, l'argent du beurre, et le cul de la crémière bien sûr, il était raisonnable. Enfin presque.

Cependant il y avait le regard des autres à Ancy quand elle était arrivée. Les électrons libres ne plaisent guère. Surtout féminins. La gaffe de cette jeune femme bien sous tout rapport, une prof ou mieux encore, instit... (bonne comme le pain, du genre à s'excuser si on lui marche sur le pied de l'avoir glissé sous votre chaussure) qui lui avait dit, candide ''je connais bien le couple qui a acheté la maison de Roure, ils sont très sympas, ce sont des amis.'' Ah bon. LE COUPLE. Raoul et Carine. Ce sont des choses qui arrivent dans une petite ville où on se marche parfois sur les pieds. Elle était donc officiellement promue à la fois star invisible et cocue. Un grade comme un autre, comme aurait dit Pagnol.

[On me vire du Mac do]

Ayant trouvé à la rivière des branches de forme élégante, (des cornes au bout d'un bâton, une sorte de bannière style ''Montjoie Saint Denis, que trépasse si je faiblis'') elle avait songé à les installer devant leur porte, à la Montespan, mais réflexion faite, avait trouvé cela un peu vulgos, et pour la carrière de Raoul qui songeait à l'avenir, ça n'aurait pas été porteur. Il était susceptible. Convenu. Ou une facette en lui l'était. Il fallait donc suivre le mouvement. Un moyen terme on dit. Jusqu'à ce que ce 'moyen' arrive..  à terme et sorte enfin de la matrice, un accouchement pénible, d'un trisomique inattendu.

Et puis il y eut ... l'horreur ?... non, un petit ennui que son égocentrisme romanesque magnifia comme elle le faisait volontiers. L'amour dans cet hôtel qui acceptait les chiens... Et un portable oublié, ouvert. Il dormait comme une bûche, épuisé, elle non... ils s'étaient  donc retrouvés songeait elle tout en faisant pipi. Un crrr crrr soudain, une lumière sur la table...  ''Où es-tu ? Je t'attends depuis vendredi !'' ... des messages, des messages, 10, 15, 20, 50 ... Il répondait : ''Je ne puis venir demain, les enfants me retiennent, ça leur ferait trop de peine... A mardi, désolé, gros bisous''.. ou :  ''j'ai raté l'avion, je suis encore à Lisbonne, un client récalcitrant, je rentre demain, oui, on ira au concert de Tsiffrovich, ce n'est que jeudi, on a tout le temps, j'ai pris les billets par internet, pardon pour ce contre temps, gros bisous...'' et des photos. Son fils avec Carine, sa petite fille dans ses bras, les repas de 'famille', son fils, sa fille, conjoints, enfants et le beau patriarche avec Carine. A l'infini. Le pire fut à  Paris, chez 'lui' c'est à dire chez Carine... personne (même pas son fils) ne l'avait prévenue qu'ils venaient alors qu'elle était à deux stations ! Et la manière dont il lui disait 'on est trop resté chez les enfants, ils en ont assez,  ils sont fatigués avec les petits.... on va partir demain.... '' ...  (parallèlement à Carine ''les enfants me retiennent'') ...  puis d'ajouter ''tu es trop exigeante, trop entière, ils te supportent mal, surtout Béatrice, mieux vaut ne pas trop s'attarder, je sens une tension monter avec elle et même avec Dimitri ...'' ça s'emboîtait.

Évidemment elle songea à s'ouvrir les veines dans le bain à la Sénèque puis, son instinct de bonne ménagère la fit immédiatement renoncer, la logeuse, quoique chère et snob, acceptait les chiens, était sympathique et le nettoyage serait épouvantable. Le sang sur de la toile de Jouy, il n'y a rien de pire ! Et puis que diable, ce n'est pas parce qu'on dispose exceptionnellement d'une salle de bains qu'il faut en profiter pour se suicider. Elle alla se recoucher. Lui, réveillé à demi se rapprocha tendrement : ''Va te faire mettre'' gronda-t-elle en se repliant. ''Moi aussi je t'aime'' répondit-il car depuis quelque temps il était devenu un peu sourd. Elle songea alors à devenir riche et célèbre, seul moyen de résister à ça, ces blessures, ces humiliations. Facile. D'abord se détendre.

Le canal de Bourgogne sur ce point était souverain. Y aurait il une mémoire de L'OVULE ? C'est là qu'elle avait été conçue au cours d'une croisade, non, croisière quoique... et elle s'y sentait toujours bien. C'était après la guerre, en 48. Lydie voulait un enfant, à 30 ans qd m disait-elle, Jean n'était pas chaud, la guerre, les stalags, elle aussi était traumatisée, son fiancé mort sous la torture... le puits de Célas...  mais son appétit de vivre parfois prenait le dessus. PARFOIS ! D'autres elle voulait mourir, ca variait. Oui, elle voulait un enfant, un enfant 'QUAND MÊME' !  ''Quand même'' c'est tout dire... Et puis argumentait-elle, Marguerite (sa mère) et Josée (sa tante) le garderait. La famille étant très peu prolifique, tous s'arracheraient ce bébé ''quand même'' voyons voyons... elle gagnait assez bien sa vie, lui aussi quoique moindrement, mais ses parents n'étaient pas démunis, il n'y avait pas de problème bla bla bla.. Après ce bourrage de crâne, Lydie organisa donc ces vacances sur le Canal...

Et neuf mois après, elle vint au monde, mais à Alès... et au passage faillit coûter la vie à sa mère, donnée pour perdue, si bien que le malheureux Jean qui ne voulait pas d'enfant se trouva en charge d'un bébé de quelques jours en bonne santé et d'une femme mourante, de surcroît sans travail, ayant abandonné sa ville, Dijon, sa famille, son poste et ses études de droit pour la suivre, elle ne supportait pas l'exil loin de ses Cévennes, la séparation d'avec sa mère et les 'siens'...  (mais c'était une époque où il n'y avait pas de chômage)... le bébé avait donc appris à se faire tout petit.. 'Tu as été voulue'. Ô oui. Mais regrettée. Aussi. Comment s'étonner qu'il l'ait plus ou moins haïe ? Le canal de Bourgogne avait la particularité de lui enlever sa tristesse.. 

Être célèbre n'était pas difficile. Mais il fallait le vouloir. Juste le vouloir. Ne pas prendre garde à droite et à gauche, filer droit. Pour soi et juste pour soi. Exacerber quelque talent. Ou frimer. Savoir se vendre. En un sens elle aurait pu aimer ça. Elle avait tant été ignorée qu'il lui fallait une revanche. Elle avait cru la trouver avec Raoul. Ce ne fut pas le cas. La goy qu'elle était fut haïe ou seulement mise à l'écart par sa famille. Transparente, encore. Mais le retrouver ainsi était douteux car il n'aimait pas qu'elle 'réussisse', ses signatures l'insupportaient parfois, il avait toujours un gros rhume chaque fois, et professionnellement n'avait jamais cherché à l'aider. Mais il n'aimait pas non plus qu'elle ne réussisse pas, ses échecs le touchant par ricochet, comme Jean autrefois dont il était presque une copie (elle avait donc épousé le clone d'un homme qui ne l'avait pas aimée, c'est malin.) C'était compliqué. Il lui fallait être double, selon les desideratas. Jouer la comédie. Devenir la Nora de ''Maison de poupée'', rôle d'idiote ou de pitre dont elle avait l'habitude, ayant eu la paix (relative) autrefois grâce à ce personnage qu'elle avait ciselé, mais tout de même assurer mine de rien. Trop performante, elle lui faisait de l'ombre d'où rétorsion, trop nulle, aussi, d'où également rétorsion.

 Elle n'aimait pas sa manière de la considérer comme un roman, passionnant, génial, peut être à ce qu'il assurait, qu'on savoure ou dévore avec plaisir, qu'on garde sur son chevet, qu'on recherche si on l'a perdu (mais où l'a-t-on mis à la fin ? Sous le lit ?) mais qu'on range ensuite dans un tiroir du Bonheur du jour sans plus y penser pendant des mois... qu'on oublie carrément puis qu'on ressort avec joie en s'étonnant qu'il soit toujours là, miracle, juste un peu jauni. Ou qu'on retrouve par accident en cherchant ses chaussettes. Il avait à l'infini des mots passionnés, dithyrambiques, presque gênants... puis refusait ou seulement OUBLIAIT de la voir, ne répondant jamais à ses appels (avant qu'elle ne renonce, en fait assez vite).  Et il lui reprochait ensuite, des mois, des années après, son silence (!) comme surpris de voir qu'elle existait encore... pour redevenir le passionné qu'ELLE avait quitté. ''Tu as tout gâché''... vertiges. Elle n'était qu'une parenthèse dans sa vie un peu convenue, terne, qui, quoiqu'il en dise, lui convenait assez, un éclair de soleil... mais qu'il faut vite fermer. Ce n'est pas sérieux, on ne peut tout avoir lui disait Lénina, sa mère, l'amour et la sécurité. (Avoir eu les deux le culpabilisait, il lui fallait donc être malheureux pour mériter de vivre, pour lui plaire, c'est ainsi qu'il fit de sa vie un drame permanent et parfois un enfer.)

Ce qui était nouveau à présent qu'il y avait Carine, c'était qu'après ses SMS à celle-ci, en général aux chiottes où il savait ne pas être dérangé, il pouvait se montrer agressif, surtout semblait-il lorsqu'il devait partir, peut être après s'être fait engueuler, qui sait ? Sa versatilité prenait des proportions extrêmes ; après des professions de foi amoureuses éléphantesques (en principe couché), il lui cherchait des poux sur la tête au peigne fin. C'était réglé. Une seconde après s'être levé, le temps de passer à la salle de bain (pipi-caca-sms Carine- trois en un, comme le shampoing, il n'aimait pas perdre son temps) hop ça partait ! Si bien que cette fois, c'est elle qui l'avait bousculé, prétendant qu'il était 10 heures quand il n'en était que 9 (tu vas rater ton train, dépêche toi) afin de couper au drame-vaudeville qui s'annonçait ... Rien de très original, la partition était toujours la même, ouverture, allegro ma non troppo, le chien sentait mauvais, aria, la vaisselle mal rangée, etc... Elle était même partie fissa avec lui - le chien- (une faena de fin de corrida. Ollé ! Charlie, grouille toi, ça bronque !) car ce jour là il montait en pression anormalement vite. (Ça c'est dégueu, pourquoi laisser l'éponge là... jamais d'hygiène... Inacceptable).. elle songea que les médicaments l'avaient peut être esquinté, les vieux riches un peu hypocondriaques, les toubibs se régalent , prescriptions sur prescriptions, vogue galère, envoyez la monnaie.. Que ce fût elle qui l'ait poussé à partir jusqu'à le houspiller le contraria un peu, ce n'était pas comme d'habitude. ''Tu as donc hâte que je rentre?'' Ce mot de 'rentrer' au début l'avait blessée, à présent elle s'était habituée. ''J'ai juste hâte que tu arrêtes de m'emmerder''. Ça y est elle l'avait dit. Et n'était pas peu fière. ''Tu ne comprends pas combien il est dur pour moi de devoir mentir tout le temps à Carine. Je ne le supporte pas, elle ne m'a rien fait, au contraire, et je lui fais du mal ..'' ... ''Et bien ne mens pas, ne nous voyons plus c'est tout'' ... ''Mais je t'aime tant, je ne pourrai pas sans toi'' etc ... Epuisée elle était. Il lui faudrait deux jours, trois ou plus pour se rétablir.

 Elle n'existait donc pour lui et qui sait ? pour d'autres aussi que comme oeuvre d'art, roman, partition ou tableau. Bouche trou peut-être ou pute gratuite. Parfois au téléphone sa voix redevenait celle du Raoul couché, c'était quand Carine était partie puis tout d'un coup, atone, glacée, c'était quand elle 'rentrait', la voix du Président qui éconduit un.e fâcheux.se. ''Bien, à plus'' et hop, avant qu'elle n'ait pu répondre, clic. C'était humiliant. Oui, devenir riche et célèbre elle ne voyait que ça... en même temps, quelle pusillanimité. Quelle honte. Elle ne savait plus.

Mais ce n'était pas de sa faute, songeait-elle après une bouffée de colère. Lénina, sa mère, misogyne comme bcp de bourges traditionnelles toujours du coté de la force, lui ayant recommandé durant toute son enfance de se méfier des femmes, ''qui n'en veulent qu'à ta position'', ce qui était d'autant plus surprenant que de position il n'y avait plus, et qu'elle même ne cachait pas s'être mariée par intérêt et économique qu'elle appelait ''raison'', il était devenu misogyne d'appoint, par mimétisme. Sans le savoir.

Il lui fallait croyait- il (sans se l'avouer ouvertement) tenir l'autre, en le cas la femme. Sa femme. "Sinon elle te dévorera. Elle n'est pas digne du fils de Nathan Bensoussan", (Lénina parlait souvent de lui à la troisième personne) .. Pas digne de lui, cela valait pour toute femme, sauf peut être la fille Barzaï qui avait 20 000 livres de dot et pourrait les tirer de la ruine qui s'annonçait. Il en riait mais en était imprégné. Cette femme impérieuse qu'était en réalité Lénina lui avait ORDONNÉ d'être ''fort'', une contradiction, ordonné  d'être un homme, un vrai, comme elle les aimait, qui pourvoit à tout, comme avait été son père... exigeant ainsi de lui des prestations opposées : ou il lui obéissait et ainsi demeurait le fils soumis, sensible et ultra timide d'une mère écrasante sous ses dehors de fragilité, ou il devenait le chef et n'avait cure de ses ordres. Il ne pouvait que faillir. Donc ne pas la mériter. Il choisit un moyen terme, devenir un être à facettes, bourgeois conventionnel par crainte de lui déplaire d'un côté et révolutionnaire par éthique de l'autre. A cet être il fallait deux univers, donc forcément deux femmes pour les habiter. Et comme par hasard, c'est à la mort de Lénina qu'il y eut Carine ; seul avec sa femme, ce n'était pas possible, il avait trop peurr d'elle. Bien sûr, elle devenait, elle ÉTAIT alors Nora, le pitre inoffensif mais il sentait parfois en elle une force irréductible dont il fallait se protéger. Comme toutes ses pareilles, elle était agréable mais peu fiable pensait-il... Et c'est ainsi qu'il aboutit ou cru aboutir à ce dont il avait le plus peur, qu'elle ne l'aimât et ne restât avec lui que par défaut ... à l'instar de Swann qui, par les injustes soupcons dont il accable Odette, finit par la pousser à le tromper réellement. Il n'y avait pas de solution. Que sa famille à elle globalement eût été plus riche que la sienne ne pesait aucun poids, chez lui, le mythe prévalait toujours sur le réel. Même morte, Lénina veillait. Il ne vivait pas, il se racontait une histoire, celle qu'elle lui avait contée, dont il faisait sa vie, et tous devant s'y plier, elle devenait vraie.

 Il fallait partir. Elle était si bien pourtant en Bourgogne, dans cette maison un peu sinistre et glacée qu'il avait achetée comme dépôt de tableaux et finalement aménagée sommairement. Pour elle avait-elle cru (car ils s'étaient revus à ce moment là... une demi heure de temps en temps, toujours dans un troquet), en fait non, c'était pour lui seulement, il lui avait du reste refusé toute ingérence dans les travaux qu'il avait effectués, mais qu'importe, elle était bien, malgré la gaffe de la voisine (celle qui connaissait bien ''le couple qui avait acheté .... '')

Elle avait peur. Peur de sa maison familiale qu'elle allait retrouver, vide, de la solitude, de tout, mais plus peur de conduire à présent, Au contraire, elle était si bien sur l'autoroute, son cordon ombilical. Il l'avait déracinée du Midi, elle avait fini par se planter, douloureusement au début, à Paris, puis par l'aimer et ne plus pouvoir tout à fait se ré inscrire dans les Cévennes ; en fait elle était maintenant fixée en deux endroits. Écartelée. Et Margueritte qui l'avait en partie élevée était morte loin d'elle. Cela, elle avait du mal à le lui pardonner. Mais étrangement la Bourgogne, intermédiaire entre les deux points, l'avait apaisée, aspirée en un rien de temps. Le pays de son père certes, mais elle avait si peu compté pour Jean que ce coup de foudre était surprenant. Une maison sans souvenirs. Pauvre. Petite. Humide. Refermée sur elle même. Inconfortable, relativement. Mais sans drames, ou pas les siens. L'idéal. Le bonheur.



vendredi 12 octobre 2018

Du coté d'Odette

Celui là est le bon, les autres post sont + ou - loupées, mauvaise manip sur blooger sans doute. 
Nouveau roman, mais collectif. '' La recherche'' vue du côté de femmes .. Titre ''Le Prince 'petit pois' '' où ''Papier cul sur bonheur du jour''...   avec seulement Solange, jusqu'à présent, marrante et talentueuse, mais sans dte bien d'autres ensuite ! Un patchwork intéressant ,

'' Pour lui, le drame était qu'elle n'était pas ''suffisante'', il lui fallait un cadre, une chambre propre, des draps en lin immaculés (sinon rien), la Roque, le somptueux rocher en vue du lit. Il ne bandait pas forcément plus mais rêvait davantage. Elle s'angoissait de seulement faire partie d'un cadre, fût-elle l'essentiel du décor (et encore !) ... car ce n'était toujours que du décor. Elle sentait par exemple que si elle pétait, il ne l'aimerait plus. Aussi s'entraînait-elle à péter un maximum afin de mesurer son amour pour elle, déterminer le moment où il allait flancher. Car il n'y a pas de milieu entre désir et dégoût. L'attente frémissante et l'horreur à vomir. Pauvres putes.. elle songea que pour cela seul, elle n'aurait sans doute pas pu embrasser une carrière apparemment lucrative et aux horaires largement aménageables. Nulle question de morale ici.

Aussi s'entraînait-elle a péter un maximum. Bien que, en aparté, cela lui coûta en terme d'alimentation. Haricots, cassoulets, soupe à l'oignon : ses exigences mettaient le cuisinier--davantage habitué à la préparation de mets raffinés et allégé pour Monsieur souffrant d'embonpoint- dans tous ses états. Mais elle n'en avait cure, et poussait la malice jusqu'à réclamer un supplément d'ail cru dans chacun des plats qui lui étaient préparés. De toutes ces menues astuces, lui n'avait pas conscience. Ennuyé, dédaigneux, il ne s'abaissait à la considérer que lorsque les exigences de la chair le taraudaient si tant est que, au niveau de sa personne, on puisse parler d'exigence de la chair. Tout bon observateur eût tôt fait de parler, à son propos, soit d'exigence de l'orgueil... soit de débordement au sujet de la chair par elle même. Mais en aucun cas, de cette pulsion virile, fière et dure, qu'on associe communément à la chair et à ses exigences... Le fait est : monsieur restait gras, en dépit des efforts patients et imperturbables de son cuisinier. Et elle, malgré un régime scrupuleusement suivi jour après jour et nettement moins diététique, restait fine, racée, princière. On eu dit une aristocrate accoquinee à un savatier un peu ivrogne

Le fait est que, des deux, c'était lui l'aristocrate. Mais il n'y paraissait point.

C'était une ordalie en somme, comme ces combats du Moyen âge où on jugeait du bien fondé d'une cause à la survivance ou la préservation du vainqueur, et de la turpitude du vaincu au fait qu'il l'était, justement ! une ordalie, comme le fut l'anorexie de sa fille, flirtant avec la mort plusieurs mois. Il ne cédait pas. Il l'aimait donc toujours.

Mais qd m ! il était parti rejoindre celle qu'il n'aimait pas. En un sens cela lui convenait tout à fait, la charge étant pour elle parfois un peu trop lourde à porter seule. ''Pas suffisante'', pensez. Restait la solitude, adorée et haie à la fois. Travailler, peindre et composer enfin, sans sa présence, son oeil critique, imprévisible et versatile. Mais aussi parfois bienveillant. Aimant. Cela variait sans cesse. Il y avait le Raoul debout et le Raoul couché, ce n'était pas le même. Le Raoul couché était prêt à tout. Le Raoul debout vitupérait pour une cuillère déplacée comme une vieille fille chatouillée. Carine, elle, rangeait très bien (celle qu'il n'aimait pas.) On ne peut tout avoir, le beurre, l'argent du beurre, et le cul de la crémière bien sûr, il était raisonnable.

Cependant il y avait le regard des autres. Les électrons libres ne plaisent guère. Surtout féminins. Il y avait eu cette jeune femme bien sous tout rapport, une prof ou mieux encore, instit... (bonne comme le pain, du genre à s'excuser si on lui marche sur le pied nu de l'avoir glissé sous votre chaussure) qui lui avait dit, candide ''je connais les gens qui ont acheté la maison de Roure, ils sont très sympas, des amis.'' Ah bon. Ce sont des choses qui arrivent dans une petite ville où on se marche parfois sur les pieds. Elle était donc officiellement promue à la fois star et cocue. Un grade comme un autre, comme aurait dit Pagnol.

[On me vire du Mac do]

Ayant trouvé à la rivière des branches de forme élégante, (des cornes au bout d'un bâton, une sorte de bannière style ''Montjoie Saint Denis, que trépasse si je faiblis'') elle avait songé à les installer devant leur porte, à la Montespan, mais réflexion faite, avait trouvé cela un peu vulgos, et pour la carrière de son mari qui songeait à l'avenir, ça n'aurait pas été porteur. Il était susceptible. Convenu. Ou une facette en lui l'était. Il fallait donc suivre le mouvement. Un moyen terme on dit. Jusqu'à ce que ce 'moyen' arrive..  à terme et sorte enfin. Un accouchement pénible. D'un trisomique inattendu.

Et puis il y eut ... l'horreur ?... non, disons un petit ennui que son égocentrisme romanesque magnifia comme elle le faisait volontiers. L'amour dans cet hôtel qui acceptait les chiens... Et un portable oublié, ouvert. Il dormait comme une bûche, épuisé, elle non... ils s'étaient  donc retrouvés songeait elle tout en faisant pipi. Un crrr crrr soudain, une lumière sur la table...  ''Où es-tu ? Je t'attends depuis vendredi !'' ... des messages, des messages, 10, 15, 20, 50 ... Il répondait : ''Je ne puis venir demain, les enfants me retiennent, ça leur ferait trop de peine... A mardi, désolé, gros bisous''.. ou :  ''j'ai raté l'avion, je suis encore à Lisbonne, un client récalcitrant, je rentre demain, oui, on ira au concert de Tsiffrovich, ce n'est que jeudi, on a le temps, j'ai pris les billets par internet, pardon pour ce contre temps, gros bisous...'' et  des photos. Son fils avec Carine, sa petite fille dans ses bras, les repas de famille, fils, fille, conjoints, enfants, le beau patriarche et Carine. A l'infini. Chez 'lui' c'est à dire chez Carine... Et personne (même pas son fils) ne l'avait prévenue, alors qu'elle était à deux stations ! Et la manière dont il lui disait 'on est trop resté chez les enfants, ils en ont assez,  ils sont fatigués avec les petits.... on va partir demain.... '' ...  (parallèlement il disait à Carine ''les enfants me retiennent'') ...  puis d'ajouter ''tu es trop exigeante, trop entière, ils te supportent mal, surtout Béatrice, mieux vaut ne pas trop s'attarder, je sens une tension avec elle et même avec Dimitri ...'' ça s'emboitait.

Évidemment elle songea à s'ouvrir les veines dans le bain à la Sénèque puis, son instinct de bonne ménagère la fit immédiatement renoncer, la logeuse, quoique chère et snob, acceptait les chiens, était sympathique et le nettoyage serait épouvantable. Le sang sur de la toile de Jouy, il n'y a rien de pire ! Et puis que diable, ce n'est pas parce qu'on dispose d'une salle de bains qu'il faut en profiter pour se suicider. Elle alla se recoucher. Lui, réveillé à demi se rapprocha : ''Va te faire mettre'' gronda-t-elle en se repliant. ''Moi aussi je t'aime'' répondit-il en s'étirant car depuis quelque temps il était devenu un peu sourd. Elle songea alors à devenir riche et célèbre, seul moyen de résister. Facile. D'abord se détendre.

Le canal de Bourgogne sur ce point était souverain. Y aurait il une mémoire de L'OVULE ? C'est là qu'elle avait été conçue, au cours d'une croisade, non, croisière ! et elle s'y sentait toujours bien. C'était après la guerre. Lydie voulait un enfant, à 30 ans qd m ! disait-elle, Jean n'était pas chaud, la guerre, les stalags, elle aussi était traumatisée, son fiancé mort sous la torture... le puits de Célas...  mais son appétit de vivre parfois prenait le dessus. PARFOIS ! Oui, elle voulait un enfant, un enfant QUAND MÊME !  ''quand même'' c'est tout dire... Et puis argumentait-elle, Marguerite (sa mère) et Josée (sa tante) le ou la garderait, la famille étant très peu prolifique, tous s'arracheraient ce bébé ''quand même '' voyons voyons... elle gagnait assez bien sa vie, lui aussi quoique moindrement, mais ses parents n'étaient pas démunis, bref, il n'y avait pas de problème bla bla bla.. Lydie organisa donc ces vacances sur le Canal...

Neuf mois après, elle vint au monde mais à Alès... et au passage faillit coûter la vie à sa mère, donnée pour perdue, si bien que le malheureux qui ne voulait pas d'enfant se trouva en charge d'un bébé de quelques jours et d'une femme mourante, de surcroît sans travail, ayant abandonné son poste et ses études de droit pour la suivre, elle ne supportait ni Dijon, ni l'exil loin de ses Cévennes, ni la séparation d'avec Marguerite et les 'siens'...  (mais c'était une époque où il n'y avait pas de chômage)... le bébé avait donc appris à se faire tout petit.. 'Tu as été voulue'. Oui. Mais regrettée. Infiniment. Bref, le canal de Bourgogne avait la particularité de lui enlever sa tristesse..  mémoire de l'ovule?

Être célèbre, ce n'était pas difficile. Mais il fallait le vouloir. Juste le vouloir. Ne pas prendre garde à droite et à gauche, filer droit. Pour soi et juste pour soi. Exacerber quelque talent. Savoir se vendre. En un sens elle aurait pu aimer ça. Elle avait tant été niée, transparente, qu'il lui fallait bien une revanche. Mais le retrouver ainsi ? Discutable. Il n'aimait pas qu'elle 'réussisse', ses signatures par exemple l'insupportaient parfois, il avait toujours un gros rhume chaque fois, et professionnellement il n'avait jamais cherché à l'aider. Mais il n'aimait pas non plus qu'elle ne réussisse pas, ses échecs le touchaient par ricochet. Comme son père autrefois, il était presque une copie. C'était compliqué. Il fallait être double, selon les desideratas. Jouer la comédie. Devenir la Nora de ''Maison de poupée'',  rôle d'idiote ou de pitre dont elle avait l'habitude, ayant eu la paix (relative) autrefois grâce à son talent d'actrice, mais tout de même assurer mine de rien. Trop performante, elle lui faisait de l'ombre d'où rétorsion, trop nulle, aussi, d'où rétorsion.

Elle haïssait la manière qu'il avait de la considérer comme un roman, passionnant, génial, peut être à ce qu'il assurait, qu'on savoure ou dévore avec plaisir, qu'on garde sur son chevet, qu'on recherche si on l'a perdu (mais où l'a-t-on mis à la fin ? Sous le lit ?) mais qu'on range ensuite dans un tiroir du Bonheur du jour sans plus y penser pendant des mois... qu'on oublie carrément puis qu'on ressort en s'étonnant qu'il soit un peu jauni. Ou qu'on retrouve par accident en cherchant ses chaussettes. Il avait à l'infini des mots passionnés, dithyrambiques presque gênants... puis refusait ou seulement oubliait de la voir, ne répondant jamais à ses appels (avant qu'elle ne renonce, en fait assez vite) et lui reprochant ensuite, des mois, des années après, son silence (!) comme surpris de voir qu'elle existait encore... pour redevenir parfois le passionné qu' ELLE avait quitté. ''Tu as tout gâché''...

Ce qui était nouveau à présent qu'il y avait Carine, c'était qu'après ses SMS à celle-ci, en général aux chiottes où il savait ne pas être dérangé, il pouvait ensuite se montrer agressif, surtout semblait-il lorsqu'il devait partir, peut être lorsqu'il s'était fait engueuler, qui sait ? il avait toujours été versatile ms là ça prenait des proportions extrêmes. Juste après l'avoir inondée de professions de foi amoureuses (au lit en principe), il lui cherchait des poux sur la tête. C'était réglé, une seconde après s'être levé, le temps de passer à la salle de bain (pipi-caca-sms Carine- trois en un, comme le shampoing, il n'aimait pas perdre son temps) et hop ça partait ! Si bien que cette fois, c'est elle qui l'avait bousculé, prétendant qu'il était 10 heures quand il n'en était que 9 (tu vas rater ton train, dépêche toi) afin de couper au drame-vaudeville qui s'annonçait ... Rien de très original, la partition était toujours la même, ouverture, allegro ma non troppo, le chien sentait mauvais, aria, la vaisselle mal rangée, etc... Elle était même partie fissa avec lui - le chien- (une faena de fin de corrida ! Ollé ! Charlie, grouille toi, ça bronque !) car ce jour là il montait en pression anormalement vite. (Ça c'est dégueu, pourquoi laisser l'éponge là... jamais d'hygiène... Inacceptable) elle songea que les médicaments l'avaient peut être esquinté, les vieux riches un peu hypocondriaques, les toubibs se régalent. Que ce fût elle qui l'ait poussé à partir jusqu'à le houspiller le contraria un peu, ce n'était pas comme d'habitude. ''Tu as donc hâte que je rentre?'' Ce mot de 'rentrer' au début l'avait blessée, à présent elle s'était habituée. ''J'ai juste hâte que tu arrêtes de m'emmerder''. Ça y est elle l'avait dit. Et n'était pas peu fière. ''Tu ne comprends pas combien il est dur pour moi de devoir mentir tout le temps à Carine. Je ne le supporte pas, elle ne m'a rien fait, et je lui fais du mal ..'' ... ''Et bien ne mens pas, ne nous voyons plus c'est tout'' ... ''Mais je t'aime tant, je ne pourrai pas sans toi'' etc ... Epuisée elle était. Il lui faudrait deux jours pour se rétablir.

 Elle n'existait donc pour lui et qui sait ? pour d'autres aussi que comme oeuvre d'art,roman, partition ou tableau. Bouche trou peut-être ou pute gratuite. Parfois au téléphone sa voix redevenait celle du Raoul couché, c'était quand Carine était partie puis tout d'un coup, atone, glacée, c'était quand elle 'rentrait', celle du Président qui éconduit un.e fâcheux.se. ''Bien, à plus'' et hop, avant qu'elle n'ait pu répondre, clic. C'était humiliant. Oui, devenir riche et célèbre elle ne voyait que ça... en même temps, quelle pusillanimité. Quelle honte. Elle ne savait plus.

 

Nouveau roman, mais collectif. '' La recherche'' vue du côté de femmes .. Titre ''Le Prince 'petit pois' '' où ''Papier cul sur bonheur du jour''...   avec seulement Solange, jusqu'à présent, marrante et talentueuse, mais sans dte bien d'autres ensuite ! Un patchwork intéressant ,

'' Pour lui, le drame était qu'elle n'était pas ''suffisante'', il lui fallait un cadre, une chambre propre, des draps en lin immaculés (sinon rien), la Roque, le somptueux rocher en vue du lit. Il ne bandait pas forcément plus mais rêvait davantage. Elle s'angoissait de seulement faire partie d'un cadre, fût-elle l'essentiel du décor (et encore !) ... car ce n'était toujours que du décor. Elle sentait par exemple que si elle pétait, il ne l'aimerait plus. Aussi s'entraînait-elle à péter un maximum afin de mesurer son amour pour elle, déterminer le moment où il allait flancher. Car il n'y a pas de milieu entre désir et dégoût. L'attente frémissante et l'horreur à vomir. Pauvres putes.. elle songea que pour cela seul, elle n'aurait sans doute pas pu embrasser une carrière apparemment lucrative et aux horaires largement aménageables. Nulle question de morale ici.

Aussi s'entraînait-elle a péter un maximum. Bien que, en aparté, cela lui coûta en terme d'alimentation. Haricots, cassoulets, soupe à l'oignon : ses exigences mettaient le cuisinier--davantage habitué à la préparation de mets raffinés et allégé pour Monsieur souffrant d'embonpoint- dans tous ses états. Mais elle n'en avait cure, et poussait la malice jusqu'à réclamer un supplément d'ail cru dans chacun des plats qui lui étaient préparés. De toutes ces menues astuces, lui n'avait pas conscience. Ennuyé, dédaigneux, il ne s'abaissait à la considérer que lorsque les exigences de la chair le taraudaient si tant est que, au niveau de sa personne, on puisse parler d'exigence de la chair. Tout bon observateur eût tôt fait de parler, à son propos, soit d'exigence de l'orgueil... soit de débordement au sujet de la chair par elle même. Mais en aucun cas, de cette pulsion virile, fière et dure, qu'on associe communément à la chair et à ses exigences... Le fait est : monsieur restait gras, en dépit des efforts patients et imperturbables de son cuisinier. Et elle, malgré un régime scrupuleusement suivi jour après jour et nettement moins diététique, restait fine, racée, princière. On eu dit une aristocrate accoquinee à un savatier un peu ivrogne

Le fait est que, des deux, c'était lui l'aristocrate. Mais il n'y paraissait point.

C'était une ordalie en somme, comme ces combats du Moyen âge où on jugeait du bien fondé d'une cause à la survivance ou la préservation du vainqueur, et de la turpitude du vaincu au fait qu'il l'était, justement ! une ordalie, comme le fut l'anorexie de sa fille, flirtant avec la mort plusieurs mois. Il ne cédait pas. Il l'aimait donc toujours.

Mais qd m ! il était parti rejoindre celle qu'il n'aimait pas. En un sens cela lui convenait tout à fait, la charge étant pour elle parfois un peu trop lourde à porter seule. ''Pas suffisante'', pensez. Restait la solitude, adorée et haie à la fois. Travailler, peindre et composer enfin, sans sa présence, son oeil critique, imprévisible et versatile. Mais aussi parfois bienveillant. Aimant. Cela variait sans cesse. Il y avait le Raoul debout et le Raoul couché, ce n'était pas le même. Le Raoul couché était prêt à tout. Le Raoul debout vitupérait pour une cuillère déplacée comme une vieille fille chatouillée. Carine, elle, rangeait très bien (celle qu'il n'aimait pas.) On ne peut tout avoir, le beurre, l'argent du beurre, et le cul de la crémière bien sûr, il était raisonnable.

Cependant il y avait le regard des autres. Les électrons libres ne plaisent guère. Surtout féminins. Il y avait eu cette jeune femme bien sous tout rapport, une prof ou mieux encore, instit... (bonne comme le pain, du genre à s'excuser si on lui marche sur le pied nu de l'avoir glissé sous votre chaussure) qui lui avait dit, candide ''je connais les gens qui ont acheté la maison de Roure, ils sont très sympas, des amis.'' Ah bon. Ce sont des choses qui arrivent dans une petite ville où on se marche parfois sur les pieds. Elle était donc officiellement promue à la fois star et cocue. Un grade comme un autre, comme aurait dit Pagnol.

[On me vire du Mac do]

Ayant trouvé à la rivière des branches de forme élégante, (des cornes au bout d'un bâton, une sorte de bannière style ''Montjoie Saint Denis, que trépasse si je faiblis'') elle avait songé à les installer devant leur porte, à la Montespan, mais réflexion faite, avait trouvé cela un peu vulgos, et pour la carrière de son mari qui songeait à l'avenir, ça n'aurait pas été porteur. Il était susceptible. Convenu. Ou une facette en lui l'était. Il fallait donc suivre le mouvement. Un moyen terme on dit. Jusqu'à ce que ce 'moyen' arrive..  à terme et sorte enfin. Un accouchement pénible. D'un trisomique inattendu.

Et puis il y eut ... l'horreur ?... non, disons un petit ennui que son égocentrisme romanesque magnifia comme elle le faisait volontiers. L'amour dans cet hôtel qui acceptait les chiens... Et un portable oublié, ouvert. Il dormait comme une bûche, épuisé, elle non... ils s'étaient  donc retrouvés songeait elle tout en faisant pipi. Un crrr crrr soudain, une lumière sur la table...  ''Où es-tu ? Je t'attends depuis vendredi !'' ... des messages, des messages, 10, 15, 20, 50 ... Il répondait : ''Je ne puis venir demain, les enfants me retiennent, ça leur ferait trop de peine... A mardi, désolé, gros bisous''.. ou :  ''j'ai raté l'avion, je suis encore à Lisbonne, un client récalcitrant, je rentre demain, oui, on ira au concert de Tsiffrovich, ce n'est que jeudi, on a le temps, j'ai pris les billets par internet, pardon pour ce contre temps, gros bisous...'' et  des photos. Son fils avec Carine, sa petite fille dans ses bras, les repas de famille, fils, fille, conjoints, enfants, le beau patriarche et Carine. A l'infini. Chez 'lui' c'est à dire chez Carine... Et personne (même pas son fils) ne l'avait prévenue, alors qu'elle était à deux stations ! Et la manière dont il lui disait 'on est trop resté chez les enfants, ils en ont assez,  ils sont fatigués avec les petits.... on va partir demain.... '' ...  (parallèlement il disait à Carine ''les enfants me retiennent'') ...  puis d'ajouter ''tu es trop exigeante, trop entière, ils te supportent mal, surtout Béatrice, mieux vaut ne pas trop s'attarder, je sens une tension avec elle et même avec Dimitri ...'' ça s'emboitait.

Évidemment elle songea à s'ouvrir les veines dans le bain à la Sénèque puis, son instinct de bonne ménagère la fit immédiatement renoncer, la logeuse, quoique chère et snob, acceptait les chiens, était sympathique et le nettoyage serait épouvantable. Le sang sur de la toile de Jouy, il n'y a rien de pire ! Et puis que diable, ce n'est pas parce qu'on dispose d'une salle de bains qu'il faut en profiter pour se suicider. Elle alla se recoucher. Lui, réveillé à demi se rapprocha : ''Va te faire mettre'' gronda-t-elle en se repliant. ''Moi aussi je t'aime'' répondit-il en s'étirant car depuis quelque temps il était devenu un peu sourd. Elle songea alors à devenir riche et célèbre, seul moyen de résister. Facile. D'abord se détendre.

Le canal de Bourgogne sur ce point était souverain. Y aurait il une mémoire de L'OVULE ? C'est là qu'elle avait été conçue, au cours d'une croisade, non, croisière ! et elle s'y sentait toujours bien. C'était après la guerre. Lydie voulait un enfant, à 30 ans qd m ! disait-elle, Jean n'était pas chaud, la guerre, les stalags, elle aussi était traumatisée, son fiancé mort sous la torture... le puits de Célas...  mais son appétit de vivre parfois prenait le dessus. PARFOIS ! Oui, elle voulait un enfant, un enfant QUAND MÊME !  ''quand même'' c'est tout dire... Et puis argumentait-elle, Marguerite (sa mère) et Josée (sa tante) le ou la garderait, la famille étant très peu prolifique, tous s'arracheraient ce bébé ''quand même '' voyons voyons... elle gagnait assez bien sa vie, lui aussi quoique moindrement, mais ses parents n'étaient pas démunis, bref, il n'y avait pas de problème bla bla bla.. Lydie organisa donc ces vacances sur le Canal...

Neuf mois après, elle vint au monde mais à Alès... et au passage faillit coûter la vie à sa mère, donnée pour perdue, si bien que le malheureux qui ne voulait pas d'enfant se trouva en charge d'un bébé de quelques jours et d'une femme mourante, de surcroît sans travail, ayant abandonné son poste et ses études de droit pour la suivre, elle ne supportait ni Dijon, ni l'exil loin de ses Cévennes, ni la séparation d'avec Marguerite et les 'siens'...  (mais c'était une époque où il n'y avait pas de chômage)... le bébé avait donc appris à se faire tout petit.. 'Tu as été voulue'. Oui. Mais regrettée. Infiniment. Bref, le canal de Bourgogne avait la particularité de lui enlever sa tristesse..  mémoire de l'ovule?

Être célèbre, ce n'était pas difficile. Mais il fallait le vouloir. Juste le vouloir. Ne pas prendre garde à droite et à gauche, filer droit. Pour soi et juste pour soi. Exacerber quelque talent. Savoir se vendre. En un sens elle aurait pu aimer ça. Elle avait tant été niée, transparente, qu'il lui fallait bien une revanche. Mais le retrouver ainsi ? Discutable. Il n'aimait pas qu'elle 'réussisse', ses signatures par exemple l'insupportaient parfois, il avait toujours un gros rhume chaque fois, et professionnellement il n'avait jamais cherché à l'aider. Mais il n'aimait pas non plus qu'elle ne réussisse pas, ses échecs le touchaient par ricochet. Comme son père autrefois, il était presque une copie. C'était compliqué. Il fallait être double, selon les desideratas. Jouer la comédie. Devenir la Nora de ''Maison de poupée'',  rôle d'idiote ou de pitre dont elle avait l'habitude, ayant eu la paix (relative) autrefois grâce à son talent d'actrice, mais tout de même assurer mine de rien. Trop performante, elle lui faisait de l'ombre d'où rétorsion, trop nulle, aussi, d'où rétorsion.

Elle haïssait la manière qu'il avait de la considérer comme un roman, passionnant, génial, peut être à ce qu'il assurait, qu'on savoure ou dévore avec plaisir, qu'on garde sur son chevet, qu'on recherche si on l'a perdu (mais où l'a-t-on mis à la fin ? Sous le lit ?) mais qu'on range ensuite dans un tiroir du Bonheur du jour sans plus y penser pendant des mois... qu'on oublie carrément puis qu'on ressort en s'étonnant qu'il soit un peu jauni. Ou qu'on retrouve par accident en cherchant ses chaussettes. Il avait à l'infini des mots passionnés, dithyrambiques presque gênants... puis refusait ou seulement oubliait de la voir, ne répondant jamais à ses appels (avant qu'elle ne renonce, en fait assez vite) et lui reprochant ensuite, des mois, des années après, son silence (!) comme surpris de voir qu'elle existait encore... pour redevenir parfois le passionné qu' ELLE avait quitté. ''Tu as tout gâché''...

Ce qui était nouveau à présent qu'il y avait Carine, c'était qu'après ses SMS à celle-ci, en général aux chiottes où il savait ne pas être dérangé, il pouvait ensuite se montrer agressif, surtout semblait-il lorsqu'il devait partir, peut être lorsqu'il s'était fait engueuler, qui sait ? il avait toujours été versatile ms là ça prenait des proportions extrêmes. Juste après l'avoir inondée de professions de foi amoureuses (au lit en principe), il lui cherchait des poux sur la tête. C'était réglé, une seconde après s'être levé, le temps de passer à la salle de bain (pipi-caca-sms Carine- trois en un, comme le shampoing, il n'aimait pas perdre son temps) et hop ça partait ! Si bien que cette fois, c'est elle qui l'avait bousculé, prétendant qu'il était 10 heures quand il n'en était que 9 (tu vas rater ton train, dépêche toi) afin de couper au drame-vaudeville qui s'annonçait ... Rien de très original, la partition était toujours la même, ouverture, allegro ma non troppo, le chien sentait mauvais, aria, la vaisselle mal rangée, etc... Elle était même partie fissa avec lui - le chien- (une faena de fin de corrida ! Ollé ! Charlie, grouille toi, ça bronque !) car ce jour là il montait en pression anormalement vite. (Ça c'est dégueu, pourquoi laisser l'éponge là... jamais d'hygiène... Inacceptable) elle songea que les médicaments l'avaient peut être esquinté, les vieux riches un peu hypocondriaques, les toubibs se régalent. Que ce fût elle qui l'ait poussé à partir jusqu'à le houspiller le contraria un peu, ce n'était pas comme d'habitude. ''Tu as donc hâte que je rentre?'' Ce mot de 'rentrer' au début l'avait blessée, à présent elle s'était habituée. ''J'ai juste hâte que tu arrêtes de m'emmerder''. Ça y est elle l'avait dit. Et n'était pas peu fière. ''Tu ne comprends pas combien il est dur pour moi de devoir mentir tout le temps à Carine. Je ne le supporte pas, elle ne m'a rien fait, et je lui fais du mal ..'' ... ''Et bien ne mens pas, ne nous voyons plus c'est tout'' ... ''Mais je t'aime tant, je ne pourrai pas sans toi'' etc ... Epuisée elle était. Il lui faudrait deux jours pour se rétablir.

 Elle n'existait donc pour lui et qui sait ? pour d'autres aussi que comme oeuvre d'art,roman, partition ou tableau. Bouche trou peut-être ou pute gratuite. Parfois au téléphone sa voix redevenait celle du Raoul couché, c'était quand Carine était partie puis tout d'un coup, atone, glacée, c'était quand elle 'rentrait', celle du Président qui éconduit un.e fâcheux.se. ''Bien, à plus'' et hop, avant qu'elle n'ait pu répondre, clic. C'était humiliant. Oui, devenir riche et célèbre elle ne voyait que ça... en même temps, quelle pusillanimité. Quelle honte. Elle ne savait plus.

Mais ce n'était pas de sa faute, songeait-elle après une bouffée de colère. Lénina, sa mére, misogyne, lui ayant recommandé durant toute son enfance de se méfier des femmes, ''qui n'en veulent qu'à ta position'', ce qui était d'autant plus surprenant que de position il n'y avait plus, et qu'elle même ne cachait pas s'être mariée par intérêt et économique et social qu'elle appelait ''raison'', il était devenu misogyne d'appoint.

Il lui fallait tenir l'autre, la femme. Sinon elle te dévorera. Elle n'est pas digne du fils de Nathan Bensoussan, (car Lénina parlait souvent de lui à la troisième personne) cela valait pour toutes, sauf peut être la fille Barzaï qui avait 20 000 livres de dot et pourrait les tirer de la ruine qui s'annonçait. Il en riait mais en était imprégné. Cette femme impérieuse qu'était en réalité Lénina lui avait ORDONNÉ d'être ''fort'', ordonné ! D'être un homme, un vrai, comme elle les aimait, qui pourvoit à tout, comme avait été son père... exigeant ainsi de son fils des prestations contradictoires : ou il lui obéissant et demeurait l'être sensible et apeuré qu'il était, ou il devenait le chef et n'avait cure de ses ordres. Il ne pouvait que faillir. Donc ne pas la mériter. Il choisit un moyen terme. Il était ainsi devenu un être à facettes, bourgeois conventionnel par crainte de déplaire et révolutionnaire par éthique, un être à qui il fallait par conséquent deux univers, donc forcément deux femmes pour les habiter. Et c'est à la mort de Lénina qu'il y eut Carine ! seul avec elle, ce n'était pas possible. Il avait trop peur. Elle devenait alors Nora, le pitre sans danger et dans le rôle prêtait d'autant plus flan à la critique (une idiote utile.) Comme toutes ses pareilles, elle était agréable mais peu fiable pensait-il... Et c'est ainsi qu'il aboutit ou cru aboutir à ce dont il avait le plus peur, qu'elle ne l'aimât et ne restât avec lui que par défaut ... comme Swann qui, par les injustes suspicions dont il accable Odette, finit par la pousser à le tromper réellement. Il n'y avait pas de solution. Que sa famille à elle globalement eût été plus riche que la sienne ne pesait aucun poids, chez lui, le mythe prévalait toujours sur le réel. Même morte, Lénina veillait. Il ne vivait pas, il se racontait une histoire, celle qu'elle lui avait injectée, dont il faisait sa vie. Et tous devaient s'y plier. Surtout elle. A coups de pieds.

 Il fallait partir. Elle était si bien pourtant en Bourgogne, dans cette maison un peu sinistre et glacée qu'il avait achetée comme dépôt de tableaux et finalement aménagée sommairement, pour elle avait-elle cru (puisqu'ils s'étaient un peu revus à ce moment là... une demi heure de temps en temps, dans un troquet) en fait non, c'était pour lui mais qu'importe, elle était bien..  Même si au début il y avait eu la gaffe de la voisine qui l'avait prise pour Carine.... Elle avait peur. Peur de sa maison qu'elle allait retrouver, vide, de la solitude, de tout. Plus peur de conduire à présent, heureusement. Au contraire, elle était bien sur l'autoroute, son cordon ombilical. Il l'avait déracinée du Midi, elle avait fini par prendre racine, douloureusement au début, à Paris, puis par aimer et ne plus pouvoir tout à fait se ré inscrire dans sa région, en fait elle était maintenant plantée en deux endroits. Écartelée. Et Margueritte était morte loin d'elle. Cela, elle avait du mal à le lui pardonner. Mais étrangement la Bourgogne, intermédiaire entre les deux points, l'avait aspirée en urienn  de temps. Le pays de Jean certes, mais elle avait si un peu compté pour lui que c'était surprenant. Une maison sans souvenirs. Sans drames, ou pas les siens. le bonheur.

jeudi 11 octobre 2018


Nouveau roman, mais collectif. '' La recherche'' vue du côté de femmes .. Titre ''Le Prince 'petit pois' '' où ''Papier cul sur bonheur du jour''...   avec seulement Solange, jusqu'à présent, marrante et talentueuse, mais sans dte bien d'autres ensuite ! Un patchwork intéressant ,

'' Pour lui, le drame était qu'elle n'était pas ''suffisante'', il lui fallait un cadre, une chambre propre, des draps en lin immaculés (sinon rien), la Roque, le somptueux rocher en vue du lit. Il ne bandait pas forcément plus mais rêvait davantage. Elle s'angoissait de seulement faire partie d'un cadre, fût-elle l'essentiel du décor (et encore !) ... car ce n'était toujours que du décor. Elle sentait par exemple que si elle pétait, il ne l'aimerait plus. Aussi s'entraînait-elle à péter un maximum afin de mesurer son amour pour elle, déterminer le moment où il allait flancher. Car il n'y a pas de milieu entre désir et dégoût. L'attente frémissante et l'horreur à vomir. Pauvres putes.. elle songea que pour cela seul, elle n'aurait sans doute pas pu embrasser une carrière apparemment lucrative et aux horaires largement aménageables. Nulle question de morale ici.

Aussi s'entraînait-elle a péter un maximum. Bien que, en aparté, cela lui coûta en terme d'alimentation. Haricots, cassoulets, soupe à l'oignon : ses exigences mettaient le cuisinier--davantage habitué à la préparation de mets raffinés et allégé pour Monsieur souffrant d'embonpoint- dans tous ses états. Mais elle n'en avait cure, et poussait la malice jusqu'à réclamer un supplément d'ail cru dans chacun des plats qui lui étaient préparés. De toutes ces menues astuces, lui n'avait pas conscience. Ennuyé, dédaigneux, il ne s'abaissait à la considérer que lorsque les exigences de la chair le taraudaient si tant est que, au niveau de sa personne, on puisse parler d'exigence de la chair. Tout bon observateur eût tôt fait de parler, à son propos, soit d'exigence de l'orgueil... soit de débordement au sujet de la chair par elle même. Mais en aucun cas, de cette pulsion virile, fière et dure, qu'on associe communément à la chair et à ses exigences... Le fait est : monsieur restait gras, en dépit des efforts patients et imperturbables de son cuisinier. Et elle, malgré un régime scrupuleusement suivi jour après jour et nettement moins diététique, restait fine, racée, princière. On eu dit une aristocrate accoquinee à un savatier un peu ivrogne

Le fait est que, des deux, c'était lui l'aristocrate. Mais il n'y paraissait point.

C'était une ordalie en somme, comme ces combats du Moyen âge où on jugeait du bien fondé d'une cause à la survivance ou la préservation du vainqueur, et de la turpitude du vaincu au fait qu'il l'était, justement ! une ordalie, comme le fut l'anorexie de sa fille, flirtant avec la mort plusieurs mois. Il ne cédait pas. Il l'aimait donc toujours.


Mais qd m ! il était parti rejoindre celle qu'il n'aimait pas. En un sens cela lui convenait tout à fait, la charge étant pour elle parfois un peu trop lourde à porter seule. ''Pas suffisante'', pensez. Restait la solitude, adorée et haie à la fois. Travailler, peindre et composer enfin, sans sa présence, son oeil critique, imprévisible et versatile. Mais aussi parfois bienveillant. Aimant. Cela variait sans cesse. Il y avait le Raoul debout et le Raoul couché, ce n'était pas le même. Le Raoul couché était prêt à tout. Le Raoul debout vitupérait pour une cuillère déplacée comme une vieille fille chatouillée. Carine, elle, rangeait très bien (celle qu'il n'aimait pas.) On ne peut tout avoir, le beurre, l'argent du beurre, et le cul de la crémière bien sûr, il était raisonnable.


Cependant il y avait le regard des autres. Les électrons libres ne plaisent guère. Surtout féminins. Il y avait eu cette jeune femme bien sous tout rapport, une prof ou mieux encore, instit... (bonne comme le pain, du genre à s'excuser si on lui marche sur le pied nu de l'avoir glissé sous votre chaussure) qui lui avait dit, candide ''je connais les gens qui ont acheté la maison de Roure, ils sont très sympas, des amis.'' Ah bon. Ce sont des choses qui arrivent dans une petite ville où on se marche parfois sur les pieds. Elle était donc officiellement promue à la fois star et cocue. Un grade comme un autre, comme aurait dit Pagnol.

[On me vire du Mac do]


Ayant trouvé à la rivière des branches de forme élégante, (des cornes au bout d'un bâton, une sorte de bannière style ''Montjoie Saint Denis, que trépasse si je faiblis'') elle avait songé à les installer devant leur porte, à la Montespan, mais réflexion faite, avait trouvé cela un peu vulgos, et pour la carrière de son mari qui songeait à l'avenir, ça n'aurait pas été porteur. Il était susceptible. Convenu. Ou une facette en lui l'était. Il fallait donc suivre le mouvement. Un moyen terme on dit. Jusqu'à ce que ce 'moyen' arrive..  à terme et sorte enfin. Un accouchement pénible. D'un trisomique inattendu.


Et puis il y eut ... l'horreur ?... non, disons un petit ennui que son égocentrisme romanesque magnifia comme elle le faisait volontiers. L'amour dans cet hôtel qui acceptait les chiens... Et un portable oublié, ouvert. Il dormait comme une bûche, épuisé, elle non... ils s'étaient  donc retrouvés songeait elle tout en faisant pipi. Un crrr crrr soudain, une lumière sur la table...  ''Où es-tu ? Je t'attends depuis vendredi !'' ... des messages, des messages, 10, 15, 20, 50 ... Il répondait : ''Je ne puis venir demain, les enfants me retiennent, ça leur ferait trop de peine... A mardi, désolé, gros bisous''.. ou :  ''j'ai raté l'avion, je suis encore à Lisbonne, un client récalcitrant, je rentre demain, oui, on ira au concert de Tsiffrovich, ce n'est que jeudi, on a le temps, j'ai pris les billets par internet, pardon pour ce contre temps, gros bisous...'' et  des photos. Son fils avec Carine, sa petite fille dans ses bras, les repas de famille, fils, fille, conjoints, enfants, le beau patriarche et Carine. A l'infini. Chez 'lui' c'est à dire chez Carine... Et personne (même pas son fils) ne l'avait prévenue, alors qu'elle était à deux stations ! Et la manière dont il lui disait 'on est trop resté chez les enfants, ils en ont assez,  ils sont fatigués avec les petits.... on va partir demain.... '' ...  (parallèlement il disait à Carine ''les enfants me retiennent'') ...  puis d'ajouter ''tu es trop exigeante, trop entière, ils te supportent mal, surtout Béatrice, mieux vaut ne pas trop s'attarder, je sens une tension avec elle et même avec Dimitri ...'' ça s'emboitait.


Évidemment elle songea à s'ouvrir les veines dans le bain à la Sénèque puis, son instinct de bonne ménagère la fit immédiatement renoncer, la logeuse, quoique chère et snob, acceptait les chiens, était sympathique et le nettoyage serait épouvantable. Le sang sur de la toile de Jouy, il n'y a rien de pire ! Et puis que diable, ce n'est pas parce qu'on dispose d'une salle de bains qu'il faut en profiter pour se suicider. Elle alla se recoucher. Lui, réveillé à demi se rapprocha : ''Va te faire mettre'' gronda-t-elle en se repliant. ''Moi aussi je t'aime'' répondit-il en s'étirant car depuis quelque temps il était devenu un peu sourd. Elle songea alors à devenir riche et célèbre, seul moyen de résister. Facile. D'abord se détendre.


Le canal de Bourgogne sur ce point était souverain. Y aurait il une mémoire de L'OVULE ? C'est là qu'elle avait été conçue, au cours d'une croisade, non, croisière ! et elle s'y sentait toujours bien. C'était après la guerre. Lydie voulait un enfant, à 30 ans qd m ! disait-elle, Jean n'était pas chaud, la guerre, les stalags, elle aussi était traumatisée, son fiancé mort sous la torture... le puits de Célas...  mais son appétit de vivre parfois prenait le dessus. PARFOIS ! Oui, elle voulait un enfant, un enfant QUAND MÊME !  ''quand même'' c'est tout dire... Et puis argumentait-elle, Marguerite (sa mère) et Josée (sa tante) le ou la garderait, la famille étant très peu prolifique, tous s'arracheraient ce bébé ''quand même '' voyons voyons... elle gagnait assez bien sa vie, lui aussi quoique moindrement, mais ses parents n'étaient pas démunis, bref, il n'y avait pas de problème bla bla bla.. Lydie organisa donc ces vacances sur le Canal...

Neuf mois après, elle vint au monde mais à Alès... et au passage faillit coûter la vie à sa mère, donnée pour perdue, si bien que le malheureux qui ne voulait pas d'enfant se trouva en charge d'un bébé de quelques jours et d'une femme mourante, de surcroît sans travail, ayant abandonné son poste et ses études de droit pour la suivre, elle ne supportait ni Dijon, ni l'exil loin de ses Cévennes, ni la séparation d'avec Marguerite et les 'siens'...  (mais c'était une époque où il n'y avait pas de chômage)... le bébé avait donc appris à se faire tout petit.. 'Tu as été voulue'. Oui. Mais regrettée. Infiniment. Bref, le canal de Bourgogne avait la particularité de lui enlever sa tristesse..  mémoire de l'ovule?


Être célèbre, ce n'était pas difficile. Mais il fallait le vouloir. Juste le vouloir. Ne pas prendre garde à droite et à gauche, filer droit. Pour soi et juste pour soi. Exacerber quelque talent. Savoir se vendre. En un sens elle aurait pu aimer ça. Elle avait tant été niée, transparente, qu'il lui fallait bien une revanche. Mais le retrouver ainsi ? Discutable. Il n'aimait pas qu'elle 'réussisse', ses signatures par exemple l'insupportaient parfois, il avait toujours un gros rhume chaque fois, et professionnellement il n'avait jamais cherché à l'aider. Mais il n'aimait pas non plus qu'elle ne réussisse pas, ses échecs le touchaient par ricochet. Comme son père autrefois, il était presque une copie. C'était compliqué. Il fallait être double, selon les desideratas. Jouer la comédie. Devenir la Nora de ''Maison de poupée'',  rôle d'idiote ou de pitre dont elle avait l'habitude, ayant eu la paix (relative) autrefois grâce à son talent d'actrice, mais tout de même assurer mine de rien. Trop performante, elle lui faisait de l'ombre d'où rétorsion, trop nulle, aussi, d'où rétorsion.


Elle haïssait la manière qu'il avait de la considérer comme un roman, passionnant, génial, peut être à ce qu'il assurait, qu'on savoure ou dévore avec plaisir, qu'on garde sur son chevet, qu'on recherche si on l'a perdu (mais où l'a-t-on mis à la fin ? Sous le lit ?) mais qu'on range ensuite dans un tiroir du Bonheur du jour sans plus y penser pendant des mois... qu'on oublie carrément puis qu'on ressort en s'étonnant qu'il soit un peu jauni. Ou qu'on retrouve par accident en cherchant ses chaussettes. Il avait à l'infini des mots passionnés, dithyrambiques presque gênants... puis refusait ou seulement oubliait de la voir, ne répondant jamais à ses appels (avant qu'elle ne renonce, en fait assez vite) et lui reprochant ensuite, des mois, des années après, son silence (!) comme surpris de voir qu'elle existait encore... pour redevenir parfois le passionné qu' ELLE avait quitté. ''Tu as tout gâché''...


Ce qui était nouveau à présent qu'il y avait Carine, c'était qu'après ses SMS à celle-ci, en général aux chiottes où il savait ne pas être dérangé, il pouvait ensuite se montrer agressif, surtout semblait-il lorsqu'il devait partir, peut être lorsqu'il s'était fait engueuler, qui sait ? il avait toujours été versatile ms là ça prenait des proportions extrêmes. Juste après l'avoir inondée de professions de foi amoureuses (au lit en principe), il lui cherchait des poux sur la tête. C'était réglé, une seconde après s'être levé, le temps de passer à la salle de bain (pipi-caca-sms Carine- trois en un, comme le shampoing, il n'aimait pas perdre son temps) et hop ça partait ! Si bien que cette fois, c'est elle qui l'avait bousculé, prétendant qu'il était 10 heures quand il n'en était que 9 (tu vas rater ton train, dépêche toi) afin de couper au drame-vaudeville qui s'annonçait ... Rien de très original, la partition était toujours la même, ouverture, allegro ma non troppo, le chien sentait mauvais, aria, la vaisselle mal rangée, etc... Elle était même partie fissa avec lui - le chien- (une faena de fin de corrida ! Ollé ! Charlie, grouille toi, ça bronque !) car ce jour là il montait en pression anormalement vite. (Ça c'est dégueu, pourquoi laisser l'éponge là... jamais d'hygiène... Inacceptable) elle songea que les médicaments l'avaient peut être esquinté, les vieux riches un peu hypocondriaques, les toubibs se régalent. Que ce fût elle qui l'ait poussé à partir jusqu'à le houspiller le contraria un peu, ce n'était pas comme d'habitude. ''Tu as donc hâte que je rentre?'' Ce mot de 'rentrer' au début l'avait blessée, à présent elle s'était habituée. ''J'ai juste hâte que tu arrêtes de m'emmerder''. Ça y est elle l'avait dit. Et n'était pas peu fière. ''Tu ne comprends pas combien il est dur pour moi de devoir mentir tout le temps à Carine. Je ne le supporte pas, elle ne m'a rien fait, et je lui fais du mal ..'' ... ''Et bien ne mens pas, ne nous voyons plus c'est tout'' ... ''Mais je t'aime tant, je ne pourrai pas sans toi'' etc ... Epuisée elle était. Il lui faudrait deux jours pour se rétablir.


 Elle n'existait donc pour lui et qui sait ? pour d'autres aussi que comme oeuvre d'art,roman, partition ou tableau. Bouche trou peut-être ou pute gratuite. Parfois au téléphone sa voix redevenait celle du Raoul couché, c'était quand Carine était partie puis tout d'un coup, atone, glacée, c'était quand elle 'rentrait', celle du Président qui éconduit un.e fâcheux.se. ''Bien, à plus'' et hop, avant qu'elle n'ait pu répondre, clic. C'était humiliant. Oui, devenir riche et célèbre elle ne voyait que ça... en même temps, quelle pusillanimité. Quelle honte. Elle ne savait plus.

 



Cependant il y avait le regard des autres. Les électrons libres ne plaisent guère. Surtout féminins. Il y avait eu cette jeune femme bien sous tout rapport, une prof ou mieux encore, instit... (bonne comme le pain, du genre à s'excuser si on lui marche sur le pied nu de l'avoir glissé sous votre chaussure) qui lui avait dit, candide ''je connais les gens qui ont acheté la maison de Roure, ils sont très sympas, des amis.'' Ah bon. Ce sont des choses qui arrivent dans une petite ville où on se marche parfois sur les pieds. Elle était donc officiellement promue à la fois star et cocue. Un grade comme un autre, comme aurait dit Pagnol.

[On me vire du Mac do]


Ayant trouvé à la rivière des branches de forme élégante, (des cornes au bout d'un bâton, une sorte de bannière style ''Montjoie Saint Denis, que trépasse si je faiblis'') elle avait songé à les installer devant leur porte, à la Montespan, mais réflexion faite, avait trouvé cela un peu vulgos, et pour la carrière de son mari qui songeait à l'avenir, ça n'aurait pas été porteur. Il était susceptible. Convenu. Ou une facette en lui l'était. Il fallait donc suivre le mouvement. Un moyen terme on dit. Jusqu'à ce que ce 'moyen' arrive..  à terme et sorte enfin. Un accouchement pénible. D'un trisomique inattendu.


Et puis il y eut ... l'horreur ?... non, disons un petit ennui que son égocentrisme romanesque magnifia comme elle le faisait volontiers. L'amour dans cet hôtel qui acceptait les chiens... Et un portable oublié, ouvert. Il dormait comme une bûche, épuisé, elle non... ils s'étaient  donc retrouvés songeait elle tout en faisant pipi. Un crrr crrr soudain, une lumière sur la table...  ''Où es-tu ? Je t'attends depuis vendredi !'' ... des messages, des messages, 10, 15, 20, 50 ... Il répondait : ''Je ne puis venir demain, les enfants me retiennent, ça leur ferait trop de peine... A mardi, désolé, gros bisous''.. ou :  ''j'ai raté l'avion, je suis encore à Lisbonne, un client récalcitrant, je rentre demain, oui, on ira au concert de Tsiffrovich, ce n'est que jeudi, on a le temps, j'ai pris les billets par internet, pardon pour ce contre temps, gros bisous...'' et  des photos. Son fils avec Carine, sa petite fille dans ses bras, les repas de famille, fils, fille, conjoints, enfants, le beau patriarche et Carine. A l'infini. Chez 'lui' c'est à dire chez Carine... Et personne (même pas son fils) ne l'avait prévenue, alors qu'elle était à deux stations ! Et la manière dont il lui disait 'on est trop resté chez les enfants, ils en ont assez,  ils sont fatigués avec les petits.... on va partir demain.... '' ...  (parallèlement il disait à Carine ''les enfants me retiennent'') ...  puis d'ajouter ''tu es trop exigeante, trop entière, ils te supportent mal, surtout Béatrice, mieux vaut ne pas trop s'attarder, je sens une tension avec elle et même avec Dimitri ...'' ça s'emboitait.


Évidemment elle songea à s'ouvrir les veines dans le bain à la Sénèque puis, son instinct de bonne ménagère la fit immédiatement renoncer, la logeuse, quoique chère et snob, acceptait les chiens, était sympathique et le nettoyage serait épouvantable. Le sang sur de la toile de Jouy, il n'y a rien de pire ! Et puis que diable, ce n'est pas parce qu'on dispose d'une salle de bains qu'il faut en profiter pour se suicider. Elle alla se recoucher. Lui, réveillé à demi se rapprocha : ''Va te faire mettre'' gronda-t-elle en se repliant. ''Moi aussi je t'aime'' répondit-il en s'étirant car depuis quelque temps il était devenu un peu sourd. Elle songea alors à devenir riche et célèbre, seul moyen de résister. Facile. D'abord se détendre.


Le canal de Bourgogne sur ce point était souverain. Y aurait il une mémoire de L'OVULE ? 


 Elle n'existait donc pour lui et qui sait ? pour d'autres aussi que comme oeuvre d'art,roman, partition ou tableau. Bouche trou peut-être ou pute gratuite. Parfois au téléphone sa voix redevenait celle du Raoul couché, c'était quand Carine était partie puis tout d'un coup, atone, glacée, c'était quand elle 'rentrait', celle du Président qui éconduit un.e fâcheux.se. ''Bien, à plus'' et hop, avant qu'elle n'ait pu répondre, clic. C'était humiliant. Oui, devenir riche et célèbre elle ne voyait que ça... en même temps, quelle pusillanimité. Quelle honte. Elle ne savait plus.

Mais ce n'était pas de sa faute, songeait-elle après une bouffée de colère. Lénina, sa mére, misogyne, lui ayant recommandé durant toute son enfance de se méfier des femmes, ''qui n'en veulent qu'à ta position'', ce qui était d'autant plus surprenant que de position il n'y avait plus, et qu'elle même ne cachait pas s'être mariée par intérêt et économique et social qu'elle appelait ''raison'', il était devenu misogyne d'appoint.

Il lui fallait tenir l'autre, la femme. Sinon elle te dévorera. Elle n'est pas digne du fils de Nathan Bensoussan, (car Lénina parlait souvent de lui à la troisième personne) cela valait pour toutes, sauf peut être la fille Barzaï qui avait 20 000 livres de dot et pourrait les tirer de la ruine qui s'annonçait. Il en riait mais en était imprégné. Cette femme impérieuse qu'était en réalité Lénina lui avait ORDONNÉ d'être ''fort'', ordonné ! D'être un homme, un vrai, comme elle les aimait, qui pourvoit à tout, comme avait été son père... exigeant ainsi de son fils des prestations contradictoires : ou il lui obéissant et demeurait l'être sensible et apeuré qu'il était, ou il devenait le chef et n'avait cure de ses ordres. Il ne pouvait que faillir. Donc ne pas la mériter. Il choisit un moyen terme. Il était ainsi devenu un être à facettes, bourgeois conventionnel par crainte de déplaire et révolutionnaire par éthique, un être à qui il fallait par conséquent deux univers, donc forcément deux femmes pour les habiter. Et c'est à la mort de Lénina qu'il y eut Carine ! seul avec elle, ce n'était pas possible. Il avait trop peur. Elle devenait alors Nora, le pitre sans danger et dans le rôle prêtait d'autant plus flan à la critique (une idiote utile.) Comme toutes ses pareilles, elle était agréable mais peu fiable pensait-il... Et c'est ainsi qu'il aboutit ou cru aboutir à ce dont il avait le plus peur, qu'elle ne l'aimât et ne restât avec lui que par défaut ... comme Swann qui, par les injustes suspicions dont il accable Odette, finit par la pousser à le tromper réellement. Il n'y avait pas de solution. Que sa famille à elle globalement eût été plus riche que la sienne ne pesait aucun poids, chez lui, le mythe prévalait toujours sur le réel. Même morte, Lénina veillait. Il ne vivait pas, il se racontait une histoire, celle qu'elle lui avait injectée, dont il faisait sa vie. Et tous devaient s'y plier. Surtout elle. A coups de pieds.

 Il fallait partir. Elle était si bien pourtant en Bourgogne, dans cette maison un peu sinistre et glacée qu'il avait achetée comme dépôt de tableaux et finalement aménagée sommairement, pour elle avait-elle cru (puisqu'ils s'étaient un peu revus à ce moment là... une demi heure de temps en temps, dans un troquet) en fait non, c'était pour lui mais qu'importe, elle était bien..  Même si au début il y avait eu la gaffe de la voisine qui l'avait prise pour Carine.... Elle avait peur. Peur de sa maison qu'elle allait retrouver, vide, de la solitude, de tout. Plus peur de conduire à présent, heureusement. Au contraire, elle était bien sur l'autoroute, son cordon ombilical. Il l'avait déracinée du Midi, elle avait fini par prendre racine, douloureusement au début, à Paris, puis par aimer et ne plus pouvoir tout à fait se ré inscrire dans sa région, en fait elle était maintenant plantée en deux endroits. Écartelée. Et Margueritte était morte loin d'elle. Cela, elle avait du mal à le lui pardonner. Mais étrangement la Bourgogne, intermédiaire entre les deux points, l'avait aspirée en urienn  de temps. Le pays de Jean certes, mais elle avait si un peu compté pour lui que c'était surprenant. Une maison sans souvenirs. Sans drames, ou pas les siens. le bonheur.